Le Président de l'Union Africaine de la Mutualité a eu l'opportunité de présenter le rôle des mutuelles dans l'extension de la protection sociale notamment en Afrique lors de la 104ème Conférence Internationale du Travail. Il a également évoqué la création de l'UAM-AFRO et a souligné le rôle du PASS dans la zone UEMOA. Retrouvez ci-après l'intégralité de son discours.
Mesdames et Messieurs,
Au nom de l'Union Africaine de la Mutualité permettez-moi de vous exprimer la fierté que j'éprouve à participer aujourd'hui avec vous à la 104ème Conférence Internationale du Travail.
Cette 104ème conférence se tient à un moment où les dirigeants du monde n'ont toujours pas tiré les conséquences de la crise économique que nous vivons.
Dans un environnement mondial caractérisé par la crise du profit au détriment de l'intérêt général, d'une société qui surexploite et détruit les ressources naturelles, une société qui favorise l'exclusion sociale et l'amassement des riches au profit d'une minorité.
Cette situation chaotique a favorisé l'émergence d'une économie alternative qui promeut la démocratie et la participation individuelle et collective, où le capital et l'argent sont considérés comme des moyens au service de la communauté et de ses membres.
Ce nouveau secteur est l'économie sociale et solidaire, Mesdames et Messieurs, dont les mutuelles sont une composante importante. Un secteur qui oeuvre à produire des biens et des services dans le but explicite de maximiser les impacts positifs sur les plans social, environnemental et culturel.
Ainsi, les mutuelles constituent une famille essentielle de l'économie sociale et solidaire. Elles occupent une place majeure et croissante dans l'accès aux soins créés par les centres de santé et les services sociaux de la mutuelle et ce dans le cadre de la couverture complémentaire, aux côtés de la sécurité sociale, participent activement à la protection sociale.
Les mutuelles sont dotées d'une gouvernance démocratique et d'un modèle économique vertueux, les mutuelles sont socialement très utiles. Renforcer le modèle mutualiste, c'est aussi un investissement durable pour la société. Les mutuelles sont connues pour leur capacité d'innovation dans le domaine de l'accès aux soins, un secteur qui doit être protégé des convoitises de certains groupements privés qui ne pensent qu'aux profits au détriment des valeurs humaines et d'inclusion sociale.
C'est dans cette optique qu'à été créée l'Union Africaine de la Mutualité, que j'ai l'honneur de présider, pour justement oeuvrer pour la promotion de l'action mutualiste sur tout le continent africain et de faire prévaloir les principes de solidarité, de non-lucrativité et la non- exclusion, valeurs chères au mouvement mutualiste mondial.
Comme vous le savez, le continent africain est conforté depuis des décennies à une crise économique structurelle et la majorité de la population demeure sans couverture médicale et souffre d'exclusion sociale. L'UAM est un instrument de mise en réseau du mouvement mutualiste en Afrique pour défendre et représenter les intérêts communs des organisations membres et être en Afrique un organisme d'assistance technique de premier ordre en matière de mutualité et dans les domaines apparentés.
L'Union est également un espace d'échange, de dialogue, de coordination et de coopération, de représentation et de plaidoyer du mouvement mutualiste africain devant les instances internationales.
Par ailleurs, l'Union s'est inscrite dans une politique de régionalisation avancée, qui s'est traduite par l'ouverture du premier bureau de liaison subrégional en décembre 2014, en l'occurrence le Bureau de l'UAM pour l'Afrique de l'Ouest (UAM-AFRO) à Abidjan, Côte d'Ivoire. Bien évidemment, d'autres bureaux régionaux sont en cours d'ouverture notamment, en Afrique du Nord, Afrique Centrale et Afrique Australe.
Notre objectif à travers ces bureaux régionaux est de promouvoir sur le terrain la mutualité, ses valeurs, l'extension de la couverture médicale et de sensibiliser les gouvernements sur notre rôle, aussi en tant qu'acteur de l'économie sociale et solidaire.
Pour se renforcer, l'UAM a mis en place des mesures ambitieuses pour développer sa position en tant que plateforme de communication, de coordination et d'échange entre les mutualistes africains. Notre objectif premier reste celui d'être au service de l'accès à des soins de qualité pour tous.
Nous travaillons également sur le développement d'un centre de formation, qui permettra de former les acteurs mutualistes de demain et de générer des emplois. Un observatoire de la mutualité sera également créé, il aura pour objectif de mesurer avec précision notre impact social et de réaliser des études pour rendre compte de nos activités et de leurs résultats.
En outre, il importe de relever que nous ne cessons, à l'occasion de chaque réunion de l'UAM, de tenir des réunions avec les ministres et les représentants des pays africains afin de débattre de l'avenir de la mutualité en Afrique et le renforcement de l'UAM en tant que plateforme de communication et d'échange d'expériences entre les mutualistes africains.
Nous sommes heureux de constater que grâce à cette union un échange fructueux des expériences entre les différents Etats constituant l'Union a permis la mise en place de solide conventions de partenariats entre des mutuelles africaines, renforçant ainsi l'esprit de la coopération sud-sud que l'UAM ne cesse de promouvoir. L'UAM entretient aujourd'hui des relations très étroites avec l'AIM (l'Association Internationale de la Mutualité) et l'AISS (l'Association Internationale de la Sécurité Sociale) où nous participons à un groupe de travail important sur la mutualité et son rôle dans l'extension de la protection sociale.
Nous avons également des relations fructueuses avec l'ODEMA, l'Organisation des Mutuelles des Amériques, qui permettent un échange d'expérience permanent et un transfert de savoir-faire. Nous adoptons des objectifs et des stratégies communes pour développer la mutualité sur les deux continents en mettant en place des modèles de gouvernance basés sur la démocratie participative et des modes de gestion non sélectifs favorisant la séparation des métiers pour préserver l'unicité des mutuelles et des paniers de soins.
Ces différents partenariats nous permettent d'échanger les meilleures pratiques et d'être plus aguerris encore. Certaines mutuelles sont également engagées à nos cotés pour nous soutenir sur le continent africain. Ainsi, un groupe de mutuelles françaises, aux côtés de la Fédération Nationale de la Mutualité Française ont initié un programme intitulé PASS (Programme d'Appui au développement des stratégies mutualiste de santé). Ce programme vise à appuyer la structuration du mouvement mutualiste en Afrique. Une partie de ce programme soutiendra notre régionalisation à travers les transferts des compétences et la création d'un système d'échange et de coopération sud-sud.
En conclusion, je souhaite aujourd'hui profiter de cette tribune pour interpeller les Ministres et les représentants des pays africains et arabes, les organisations internationales et vous tous afin de mettre en place une politique de santé efficace où les mutuelles assurent un rôle de régulateur du système de couverture de santé.
Je demanderai aussi aux organisations internationales et les pays du nord de soutenir les pays africains dans l'extension de la couverture médicale de base afin de réussir le grand chantier d'inclusion sociale. Le mouvement mutualiste africain se tient aujourd'hui à votre disposition pour contribuer davantage à l'extension de la protection sociale en Afrique.